jeudi 5 avril 2012

Partenariat public - privé : les raisons de s'opposer !

Fusion l'hôpital public de Fontainebleau avec la clinique :
LES RAISONS DE S'OPPOSER

Le scandale de l'hôpital d'Evry-Corbeil montre que le personnel et la population ont tout à redouter des «partenariats» publics-privés !

Le centre hospitalier de l'Essonne est sommé de réaliser encore 2 millions d'économies sur les dépenses des personnels d'ici fin 2011. La mise en service du nouveau centre clinique-hôpital était initialement prévue pour mai 2011, puis pour septembre. Aujourd’hui on parle de janvier 2012. Mais rien n'est sûr.

Le projet de partenariat public-privé (PPP) est au cœur d'un imbroglio juridique et financier sans fin. Et la facture s'alourdit : le loyer initialement prévu de 30 millions d'euros par an en 2006 atteint aujourd'hui 43 millions. Il semblerait bien que le personnel doive en payer les conséquences. L'ARS compte en effet imposer au centre hospitalier, dans le cadre du budget 2011 qui fait état d'un déficit de 19 millions d'euros, plus de 2 millions d'économies supplémentaires sur les dépenses de personnel. C'est-à-dire faire peser sur le personnel des choix qu'il n'a pas pu refuser... puisqu'il n'a pas été consulté.

Car ce plan d'économie se traduira par l'arrêt des recrutements, la remise en cause du processus de titularisation des contractuels, le non-renouvellement des CDD et la baisse du nombre de lits. Une centaine d'emplois sont ainsi menacés. Depuis deux ans déjà, l'ensemble du personnel est soumis à un sévère plan d’austérité : remplacement des absents par les heures supplémentaires et le renoncement aux jours de congés posés. Les crédits d'heures explosent. Suppression de la chirurgie et de la radiothérapie – qui étaient pourtant le seul service public de l'Essonne. Etc.

En réalité, ce PPP (partenariat public-privé), comme tous les autres, vise à étrangler le service public au profit d'intérêts privés. Le centre hospitalier paye – en plus de ses charges habituelles – un loyer à la société privée Eiffage pour un hôpital vide. Addition qui, au final, sera encore payée par les patients et par le personnel.

Mais à Evry-Corbeil seuls les murs sont concernés.
A Fontainebleau, le projet implique aussi la mutualisation des services !

Dans ce projet de fusion, les activités les plus rentables (comme l'ophtalmologie, la chirurgie, l'ORL...) seront très majoritairement réservées à la partie clinique. Les activités peu rentables (maternité, médecine interne, cancérologie...) seront dans la partie hôpital. Cela se traduira donc par une baisse de l'offre de soin dans le secteur public au bénéfice de la clinique.

La «T2A» obligera la partie hôpital à faire des bénéfices comme la partie clinique. Mais l’hôpital public a des missions que n'a pas une clinique privée : obligation d'accueil sans aucune discrimination, permanence des soins, formation des personnels... D'autre part, les autorités de tutelle reverront à la baisse la valeur de chaque acte, ce qui condamne l'établissement public à être toujours en déficit, même lorsqu'il augmentera son activité. Ne pouvant atteindre ces objectifs de rentabilité, la partie hôpital verra fatalement diminuer son financement, ce qui entraînera une baisse de l’efficacité et de la qualité de ses services.

La «mutualisation» de certaines activités introduira une concurrence dans certains secteurs médicaux-techniques (laboratoires, radiologie) alors que les moyens alloués et les obligations de chacun seront bien différentiés. Il faut se souvenir que les GCS (Groupement de Coopération Sanitaire) se sont vu confier toutes les possibilités juridiques d'une gestion privée, y compris des services publics s'y attachant.

Une grande communication a lieu sur les déficits de l'hôpital. Mais qu'en est-il de l'état financier de la polyclinique ? La plateforme du Bréau ne sera t-elle pas aussi la bouée de survie de la clinique sur le dos des contribuables ?
Quelles conséquences cette fusion aura t-elle
sur les conditions de travail au sein de l'hôpital ?

Le projet étant entouré d'un certain secret, il n'est pas facile d'y voir clair. Mais un rapide point sur la situation actuelle à l'hôpital nous éclaire un peu sur ce qui attend le personnel et les patients.

Ces dernières années, la gestion de l'hôpital s'est faite au détriment des conditions de travail des personnels et au détriment de la qualité des services. Les effectifs du personnel ont été revus à la baisse. Les conditions de travail et la précarisation des statuts ont rendu les postes de l'établissement peu attractif et il rencontre à présent des difficultés pour recruter.

Le directeur de l'hôpital envisage l'organisation en 12h pour l'ensemble des services pour palier le manque d'effectif. Un «sondage» a été adressé au personnel du pôle mère-enfant après un an de fonctionnement en 12h : parodie de consultation une fois que les décisions ont été prises. Si les 12h peuvent satisfaire les personnels qui souhaitent concentrer leur temps de repos, la charge de travail étant très lourde, tout le monde pourra t-il tenir ? Certains personnels ne sont-ils pas déjà extrêmement sollicités ? Autre mesure pour compenser les baisses d'effectif : le fonctionnement par «pôles». Le personnel ne sera plus affecté à un service mais sur plusieurs et «tournera» selon les besoins (arrêt maladie, congé maternité, etc.). Il en découlera un évident manque de spécialisation dans chaque pôle. Aucune formation sérieuse n'est prévue lors d'un changement de pôle. Une infirmière affectée depuis plusieurs années en chirurgie peut-elle être instantanément efficace en réanimation ? Cela n'est pas sérieux.

Parmi ceux qui concoctent aujourd'hui le projet de fusion avec la clinique, il y a ceux qui (dès)organisent le travail actuellement sur l'hôpital... Aucune information ne filtre sur la façon dont le personnel travaillera avec le privé. Quelle collaboration ? Actuellement, en cas d’urgence ou de gros problème dans un service, une  entraide ponctuelle s'organise ; cela pourrait-il toujours être le cas avec le personnel du privé ? Quelle conséquence pour les patients si il n’y a plus d’entraide entre les services ?

Cette fusion apportera t-elle plus de démocratie
dans le fonctionnement de l'hôpital ?

La façon dont se passent les choses apporte une réponse. La mise en place de ce projet a été progressive et sournoise. En 2004, il n'était pas question de «fusion» mais de  «rapprochement»avec la clinique. Des votes successifs de la CME «sans engagement particulier» obtenaient des«avis favorables» pour étudier une «faisabilité de rapprochement». Les médecins ont été inquiétés par  le discours de la direction expliquant qu'il n'y avait pas d'alternative et que refuser une telle «opportunité» revenait à «se faire bouffer tout cru». Ainsi, de proche en proche, un projet de fusion a été imposé qui affaiblira l’hôpital public et l'accès aux soins pour tous.

Une majorité contre ce projet s'est exprimée lors d'un vote à la CTE. A la CME le vote a donné1/3 contre et 2/3 favorables. Mais aucune discussion n'a été organisée dans les services. Tout au plus le personnel a t-il été convié à se prononcer (à main levée) sur l'emplacement choisi pour le futur site... La plupart des réunions organisées à son intention l'ont été pour l'informer de ce qui avait déjà été décidé. Le personnel a été écarté des négociations avec la clinique tout comme les médecins opposés au projet. Un
 «comité de pilotage» (COPIL) très restreint s'en charge. Selon une logique opaque, chaque partie cède des pans de son activité ou accepte de«mutualiser les moyens» en les soumettant à des critères de gestion privée (GCS). Chaque partie engage donc son propre personnel selon ses intérêts ; l’hôpital a ainsi réduit son budget en personnel titulaire...

Ce projet se met en place dans l'opacité et sans processus démocratique.
Les informations sont données au compte-goutte.
Ni la population du bassin de santé ni le personnel de l'hôpital n'ont été consultés. Pourquoi ?
Que craignent les promoteurs  de ce projet ?
Dans ces conditions, a t-on la moindre raison d'avoir confiance ?
Car finalement, a qui profitera réellement cette fusion ?

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