lundi 17 avril 2017

Compte rendu de la réunion publique du 29/3/2017

COMITE DE DEFENSE DE L’HOPITAL PUBLIC DE FONTAINEBLEAU

ASSEMBLEE DEBAT
POUR LA DEFENSE
DES HOPITAUX DU SUD 77

Docteur Christophe PRUDHOMME médecin urgentiste – APHP
Association des Médecins Urgentistes de France - CGT
Mercredi 29 mars 2017, 20 heures Hôtel de l'Aigle Noir, Fontainebleau

Compte rendu de la réunion publique




Introduction par le représentant du Collectif


     Mesdames et Messieurs,
     Les membres du Collectif de Défense de l’Hôpital Public de Fontainebleau vous remercient d’avoir répondu à leur invitation.
     Nos remerciements s’adressent également à Christophe PRUDHOMME qui a bien voulu être présent afin nous apporter :
-        ses informations,
-        son expérience de responsable syndical,
-        son avis sur la situation actuelle du service public de santé dans notre pays, dans le sud de la Seine-et-Marne
-        et des éléments pour mettre en place des propositions alternatives  
     Nous remercions également le directeur de l'hôtel qui a mis cette belle salle de son établissement à notre disposition.  Nous tenons à saluer l’esprit d’ouverture de notre hôte et sa volonté de créer les conditions d’un vrai débat démocratique dans notre agglomération.
     Enfin, nous souhaitons rendre hommage aux personnels hospitaliers qui, malgré l’avalanche de réformes qui s’est abattue sur l’hôpital, continuent d’offrir une haute qualité de soins dans des conditions de plus en plus difficiles.

     En France, l’hôpital a toujours été synonyme d’accès aux soins pour tous. Malheureusement, ce principe d’égalité se heurte de plus en plus aux enjeux de la rentabilité car, aujourd’hui :
-        l’hôpital est géré comme n’importe quelle entreprise,
-        la santé étant considérée comme une marchandise, le patient comme un consommateur
-        et le médecin comme « un producteur de soin ».
     Le fonctionnement des hôpitaux du sud de notre département, à Fontainebleau, Montereau, Nemours, est lourdement remis en cause par les politiques de restrictions budgétaires initiées par les gouvernements successifs.
   
     Les membres du collectif constatent, hélas, cette dégradation du service public sur l’ensemble du territoire du sud du département, en zone urbaine comme en zone rurale. Ce phénomène est douloureusement ressenti par les patients et le personnel de santé.

     Dès sa création, en 2011, le Collectif de Défense de l‘Hôpital Public de Fontainebleau s’opposa au projet d’hôpital public privé à Fontainebleau, projet largement soutenu à l’époque par la municipalité avec le concours actif du chef de l’Etat.

-        Manifestations, pétitions, délégations se multiplièrent.
-        L’ARS émit un  avis négatif sur l’ensemble du dossier de cette structure publique – privée.
     Notre collectif se félicite d’avoir porté haut les valeurs du service public et d’avoir sans cesse milité pour un hôpital public de proximité accessible à tous.
     Notre livre blanc, diffusé en 2016, traduit notre inquiétude quant à la pérennité de l’hôpital de Fontainebleau.

     Aujourd’hui, en 2017, nous le constatons tous, les mauvais coups contre le service public de santé se multiplient, se poursuivent, conséquences des politiques successives mises en place :
-        Baisse des dotations,
-        non remplacement des départs en retraite,
-        regroupement à marche forcée des établissements comme c’est le cas depuis janvier 2017 pour les hôpitaux de Fontainebleau, Montereau, Nemours,
-        disparition des fonctions essentielles de l’établissement de proximité, accessible à tous,
-        constitution de groupements hospitaliers de territoire, GHT, retirant toute autonomie aux hôpitaux de proximité,
-        éventuel rattachement des hôpitaux du sud seine et marnais au GHT de Melun, précisons que le nouvel hôpital de Melun sera un établissement public privé, beaucoup plus privé que public.

     Vous l’avez compris, Mesdames et Messieurs, à travers ce débat, nous lançons une alerte sur la situation de l’hôpital public.
     Il y a vraiment urgence, sans jeu de mot !
     Au cours de ce débat, nous vous proposons :
-        d’échanger les informations,
-        de prendre conscience de la gravité de la situation,
-        d’élargir l’audience de notre collectif,
-        d’exiger l’instauration d’une véritable démocratie sanitaire alors que s’élaborent dans la plus grande opacité les Plans Régionaux de Santé pour 2018
-        de construire une riposte à la hauteur des enjeux en proposant des solutions alternatives.

Permettez-moi pour conclure mon propos de reprendre une phrase de notre tract :
Soyons acteurs de l’avenir du service public de santé



Conférence du Dr Christophe Prudhomme


Introduction


Le secteur de la santé publique comme privé fait l'objet de restructuration massive, qui ont des effets locaux mais entraînent aussi des difficultés à l'échelle du pays.

En 2012, des questions qui auraient du être débattues lors des présidentielles sont restées lettres mortes, mais en 2017, elles se sont invitées auprès des candidats.
La tarification à l'acte (T2A), système étranger qui trouve vite ses limites, est critiquée même par ceux qui le trouvaient formidable. Certes, ils ne vont pas jusqu'à en demander la suppression mais au moins l'adaptation.
Beaucoup de nos concitoyens ne font plus confiance, avec raison, aux hommes politiques sur ce sujet.

Dans les années 2000, notre système de santé était considéré comme le 1er au monde, car il était fondé sur deux forces en voie de dégradation : le service public et la solidarité à travers la sécurité sociale.

Un service coûteux car rendu complexe


Pourquoi notre système de santé est-il l'un des plus coûteux ?
On peut se demander si on pourrait faire mieux avec un tel volume de dépense.

En 1945, il était envisagé dans le cadre du programme du Conseil national de la résistance, une sécurité sociale intégrale. Cependant, les syndicats qui s'étaient battu pour avoir des mutuelles ont rechigné à les abandonner, comme d'autres ont renâclé à l'abandon des régimes spéciaux. Du coup, le système n'a jamais été terminé ni intégré complètement.
L'idée de couverture médicale universelle (CMU) allait dans ce sens, mais s'est soldé par une augmentation de la complexification.
Bref, au lieu d'un système unique, on en a trois :
- la sécurité sociale,
- la mutuelle,
- la sur-complémentaire, dont d'ailleurs ne bénéficie pas complètement certains professions ou les retraités.
La complexité est tel que l'on ne sait pas qui fait quoi, on sait combien on paye mais pas combien on sera remboursé : on a une renonciation au soin de 38 %, avec un tel motif financier.

Le libéralisme favorise cette désintégration et cette complexification qui permet de démultiplier les prises de bénéfice.
La clinique privée est le modèle le plus abouti :
- des investisseurs sont propriétaires murs et exigent un loyer,
- une société exploitante associe les médecins qui veulent des dividendes,
- des opérateurs interviennent à titre complémentaire (imagerie médicale)  et exige le paiement de prestations,
- des services complémentaires sont encore demandés (hôtellerie spécialisée par exemple).
Cette clinique bénéfice de remboursements de la sécurité sociale pour des prestations et des prises de bénéfice à tous les niveaux.

La question du financement


Actuellement, c'est une opération de concentration des cliniques privées, organisé par un fonds luxembourgeois de 120 Mrds € (il s’agit du groupe ELSAN second groupe français des établissements de soin commerciaux dont le propriétaire est un fonds d’investissement luxembourgeois CVC CAPITAL PARTNER).
Bref, on a un outil public au service d'opérations privées. ELSAN  développe un projet de 250M€ sur 3 ans dont 100M€ d’euros serait financé par ICADE SANTE branche de la caisse des dépôts et Consignation ce qui est proprement scandaleux quand on sait que les rendements de CVC sont de 22% et transférés au Luxembourg tout cela grâce à des aides publiques...

         Le financement public permet des économies de frais financiers (les intérêts de la dette). Autrefois les emprunts étaient de 30 à 50 ans avec bonification, réduisant au frais de gestion.

 Aujourd'hui le coût de l'argent est presque gratuit, mais la technocratie pousse à emprunter à des banques et non au secteur public. Un tel changement de pratiques, permet de générer des profits, au détriment des hôpitaux publics qui ont une charge financière inadmissible.
Ici  il faut bien préciser en quoi ce plan d’investissement n’est pas à la hauteur des enjeux, son coût devrait être inférieur par des prêts plus avantageux avec la « Caisse des Dépôts  et Consignation » ou tout autre établissement financier sur des durées mieux adaptées. La vente des terrains d’un apport si faible (4M€) bloquant toute évolution pourrait être annulée.  Le patrimoine hospitalier serait alors préservé et autoriserait  des projets sanitaires utiles au territoire (éducation, prévention, HAD… ) un développement ultérieur du service public hospitalier redeviendrait possible.
 
Financement de la rénovation de l'Hôpital de Fontainebleau

La ressource la plus importante est constituée par le recours à l'emprunt (70.6M€ sur 10 ans).
Pour mémoire, trois emprunts seront contractés par l'établissement au cours de la période
• 59.6M€ pour financer l'opération de reconstruction / réhabilitation du secteur M.C.O.
• 9.3M€ pour financer l'opération de: construction de I'EHPAD
• 1.75M€ pour acheter le bâtiment de I'ESIGETEL.
La charge annuelle de remboursement de la dette augmente d'1M€ entre 2015 et 2024, de 2.1M€ à. 3.1M€ (avec un « pic » de doit constituer un moteur de remboursement à 3.45M€ en 2019).
Les nouveaux emprunts contractés pour ['opération de reconstruction M.C.O.;
la construction du nouvel E.H.P.A.D et l'achat du bâtiment de l'E5IGETEL sont tous remboursés sur 20 ans,
à l'exclusion d'un prêt contracté auprès de la Caisse des Dépôts et Consignations pour le nouvel hôpital, d’un montant de 22,851M€, remboursé sur 30 ans.


Une solution : l'unification avec une caisse publique unique


La solution, c'est la création d'une caisse unique de sécurité sociale.
Ce système existe en Alsace Lorraine et en Allemagne. Il y a 5 % maximum de cliniques commerciales. En France, c'est jusqu'à 50 % d'opérateurs privées selon le type de pratiques.
En Alsace Lorraine, la caisse est gérée non pas de manière paritaire (avec le patronat donc) mais par les salariés, avec une taxe de 1,5 % sur les salaires qui permet 99 % de remboursement. Le financement est géré au coût réel sans financement par le déficit, mais par l'augmentation de la perception.

         Le recours au secteur privé, même mutualiste, est moins efficace que le secteur public.
A la sécurité sociale, pour 100 €, 95 € est redistribué.
Les complémentaires prennent d'important frais de gestion sinon des bénéfices, le taux de redistribution tombe à 80 %. (actionnaire, démarchage…).

Un système libéral inefficace


         On constate de grands besoins en généralistes, avec des secteurs très déficitaires. On a fait confiance au système libéral, le résultat c'est que les problèmes de répartition se sont aggravés.
         Il faut bien se figurer que la médecine a changé. Les patients du XXIème siècle ne sont pas les mêmes qu'au siècle précédent. L'essentiel des dépenses de la sécurité sociale ne porte pas sur les personnes âgées, mais les plus de 50 ans avec des affections de longue durée (ALD). Cela exige une adaptation du lien avec le médecin, non plus une consommation ponctuelle mais une relation continue. Alors ?
         Force est de constater que des 10 % des cas d'urgence relève d'effets secondaires, dont 8/10 médicamenteux.
40 % des médicaments prescrits finissent à la poubelle.
En fait, il faut du temps pour expliquer un traitement, notamment de longue durée.
         Mais les libéraux n'ont pas le temps.

Les médecins, en réalité des salariés indirects de la sécurité sociale


Les médecins libéraux ne sont pas des vrais libéraux, car ils sont financés par la sécurité sociale. Avant 1945, le métier était prestigieux et pour certains lucratif, mais pour le commun des médecins, il était financièrement difficile. C'est la sécurité sociale qui les paye.
Alors, on pourrait réfléchir à un autre régime, une autre modalité.

Pourquoi ne pas avoir des médecins en centres publics de santé ?
1.    Des médecins qui n'auront plus à se préoccuper de l'administration,
2.    Des médecins qui auront le temps de se consacrer uniquement à la médecine,
3.    Des médecins qui auront la garantie d'avoir des revenus sans faire du commerce.
4.    Il faut des structures plus ouvertes (ce qu'un médecin seul ne peut pas assurer), évitant le recours aux urgences donc, avec un plateau technique, avec suffisamment de personnel.
5.    Le centre crée un lien avec l'hôpital et assure la continuité de la prise en charge, sans rupture de charge. Le mode de rémunération par la sécurité sociale de manière forfaitaire assure un service non lucratif et non soumis à l'impératif de la quantité.


Le médecin, pur libéral ou agent de la santé publique ?


Selon l'organisation mondiale de la santé (OMS),
1.    le médecin n'a pas seulement la charge d'une clientèle,
2.    mais doit s'investir dans les programmes de préventions,
3.    de vaccinations,
4.    agir pour la santé publique.
5.    Les médecins devraient normalement agir dans la suppression des causes de maladie et pas seulement les traiter.

Par exemple, la démoustication était organisée par les DRASS avec des médecins de santé publique, dont la disparition a entraîné le développement du risque. La recherche pour un vaccin contre le chikungunya c'est bien, mais la suppression de l'anophèle porteur, c'est encore plus efficace.


         L'état de santé d'une population dépend de l'égalité de traitement, non pas au nom d'une idéologie, mais de l'efficacité médicale.
Par exemple, la tuberculose ne peut être éradiquée que si l'ensemble des populations est traité, en situation régulière ou non.

Le devenir des hôpitaux


Il ne faut pas opposer la médecine de Ville et l'Hôpital.

La suppression massive des lits (100.000 lits en 20 ans) officiellement pour favoriser l'ambulatoire, mais souvent pour des raisons comptables n'est pas une solution.
L'ambulatoire, bien qu'intéressant n'est pas une panacée, tout dépend du type d'opération, de l'état du patient, de ses capacités de récupération, de ses possibilités d'hébergement, de transports...
La capacité globale d'accueil est un indice tout à fait insuffisant et l'ambulatoire ne saurait compenser les lits.

Des données internationales validées établissent que lorsqu'un établissement atteint 85 % de sa capacité, il y a au-delà un risque statistique de perte de chance, c'est à dire une surmortalité de 30 %. Tout simplement parce que la saturation du personnel arrive plus vite, mais aussi parce que la suppression des lits va entraîner un sous-dimensionnement.
Cette analyse est validée par l'expérience : on a sous les yeux, le cas de l’épidémie de grippe l’hiver dernier 2016-2017 avec une surmortalité de 20.000 individus.
Il y a eu des morts sur des brancards, des personnes âgées y sont restées plusieurs heures faute de places, ce que l'on aurait pu éviter sur des brancards ...

On constate hélas que la politique de réduction se trouve au niveau local comme national. Pour le passé comme le futur.

En 10 ans de 2004 à 2014 à Fontainebleau : le nombre de lits de chirurgie est passé de 60 à 45 soit une baisse de 25 %. l'activité chirurgicale a été réduite de 22,64 % (13 978 journées hospitalisation contre 10 813 actuellement).
Les effets de la fusion-réorganisation de la chirurgie : 83 lits perdus, 3020 entrées en moins 2004-2014 : total de 83 lits de chirurgie (3020 entrées perdues/an soit 15904 journées) fermeture du bloc de 60 lits de Nemours (soit 10462 journées/an disparues) et suppression de 7 chirurgiens sur 10; fermeture en 2011 de 15 lits à Fontainebleau (-3165 journées/an); fermeture de 8 lits à Montereau (-2277 j./an)


Réduction capacitaire en lits et en mutation de services à Fontainebleau (2014-2020°
Le tableau ci dessous montre une perte de 61 lits en médecine partiellement compensée, mais au final l’hôpital perd 23 lits ce qui n’est pas souhaitable pour des raisons sanitaires.



Lits installés en hospitalisation complète
Source : Drees, enquête SAE.



Le sous-recrutement – le management du personnel


Les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EPHAD) sont présentés comme des maisons de retraite médicalisées. Mais elles souffrent d'un sous effectif en général (en Allemagne, le personnel est deux fois plus nombreux), mais aussi pour les médecins.

         Il y a aussi des problèmes liés au numerus clausus. Par exemple ¼ des médecins ont du faire des études à l'étranger. On est obligé de fermer des hôpitaux ou des services pour faire face au manque de praticiens.
Les urgences Meaux ont failli temporairement fermées, si les agents des autres services ne s'étaient pas mobilisés.

         Enfin, en plus du sous-recrutement, le passage au 12 heures permet de faire des économies (2 équipes à gérer plutôt que 3), mais au détriment de la qualité de vie et de travail du personnel. A Fontainebleau, les conséquences sont palpables.

A Fontainebleau, corrélation de la baisse des effectifs – 12h et les absences




Les ressources - Les médicaments

Certains candidats proposent des remboursements à 100 % mais sur un panier de prestations et médicaments : c'est inadmissible ! Comment faire la différence entre une mauvaise et une bonne grippe ? D'ailleurs, le fait de ne pas traiter pour cause financière, c'est créer des risques supplémentaires de maladies sinon d'épidémie.
Une sécurité sociale intégrale doit être totale.

Il serait facile de faire des économies sur les produits de santé.
Par exemple, en Suède, il n'y a que 850 produits qui ont une AMM permettant le remboursement, en France, c'est 6000 !
Autre exemple, le traitement contre l'hépatite C vendu 80.000 € pour 12 semaines a été négocié à 43.000 € par le ministre. Mais en Inde, Afrique du Sud ou Algérie, les pays ont soit imposé des licences obligatoires, soit écarté le brevet. L'Algérie a proposé le même traitement à 1000 €n refusé pour des motifs de qualité mais plus sûrement de lien avec les magnats du médicament.

D'un point de vue général, il faut souligner que de fortes économies pourraient être obtenues.
Certains impôts pourraient être supprimés comme la taxe sur les salaires qui pèsent de 3,5 Mrds sur les hôpitaux et n'a absolument aucun sens. Cette taxe est étonnante en général : la puissance publique lève en effet un impôt sur elle-même : en 2001 on estimait que 41 % du produit de la taxe sur les salaires sont acquittés à l'aide de financements d'origine publique (budgets des hôpitaux, subventions publiques aux associations, budgets des caisses de sécurité sociale, etc.) ...
Une telle économie permettrait de financer sans difficulté les postes qui manquent.

Ouverture à la réflexion et à l'action

La solution absolue n'existant pas, on ne propose pas la destruction de toute médecine libérale, mais de mieux assurer la rémunération des médecins notamment dans les zones déficitaires en assurant une meilleure couverture avec un lien avec l'hôpital affirmé pour une chaîne de soins complètes. Rien n'interdirait d'envisager une rémunération forfaitaire de médecins libéraux réunis en coopérative territoriale avec une convention, en parallèle de centres publics de santé.

Bref, l'argent de la sécurité sociale et plus généralement des cotisants ne doit aller qu'à des opérateurs de service public, en tout cas qui ne profite pas pour en tirer un bénéfice commercial. C'est tout à fait antinomique avec les principes de la médecine.

L'organisation actuelle écarte les personnels, les élus et les patients du dialogue, désinforme largement, donne des pouvoirs exceptionnels à des non patriciens. Les fusions actuelles n'améliorent pas la situation mais la dégradent : 1+1< 2 !



Discussion générale

Le débat est ouvert avec la salle.

Le numérus clausus


Un numerus clausus destructeur face à une population en constante augmentation : 1980 : 8000; 1992-1999: 3600; 2016 : 7000; 2017 : 8000.



Un déficit de médecins a été organisé avec une logique absurde : moins de médecins, moins de prescriptions, de moins de dépenses.
Cependant, la densité de travail a augmenté, et les médecins ont d'autres aspirations, notamment en terme de qualité de vie.

Il n'y a d'ailleurs pas seulement un problème de démographie médicale mais une hiérarchie imposée et une dévalorisation de la médecine générale.
La formation continue a été sous organisée par le Conseil national de l'ordre des médecins (CNOM), qui n'est pas suffisamment représentatif de la diversité de la profession. On constate par exemple que les professeurs de médecine sont avantagés, comme double agent public ou encore comme bien représenté au Parlement ou avec des avantages en terme de cotisations sociales.

Mais même en terme de nombre, le travail du médecin est pollué par des considérations matérielles ou des obligations dispensables.
Ainsi, certains actes médicaux pourraient être mieux faits par d'autres (des actes techniques peuvent être délégués). Il existe par exemple des infirmières cliniciennes dans d'autres pays.

L'organisation de la pénurie est une arme permettant la destruction des hôpitaux par raréfaction du personnel.
L'imagerie médicale est ainsi en sous développement, alors que les praticiens privés sont mieux payés : au lieu de recourir à des praticiens publics moins chers, le service au sein d'un hôpital risque d'être remplacé par une externalisation.

La régression foncière et le démantèlement de l'hôpital de Fontainebleau


Le plan global de financement pluriannuel prévoit la cession de biens pour 4.2M €, répartie ainsi, 730 000 € au titre de la vente du C.R.M., 1.860.000 € au titre de la vente du bâtiment Philardeau et 1.610.000 € au titre de la vente des bâtiments anciens.
Ces cessions traduisent la restriction du territoire hospitalier et l'abandon de toute possibilité d'extension future de l'hôpital : c'est la condamnation de l'avenir.
 Le bâtiment le plus ancien est inscrit au titre des monuments historiques ce qui impose une conservation que l'acheteur devra respecter, et comporte une chapelle toujours desservie, alors cette affectation est, selon la jurisprudence du Conseil d’État, légale, gratuite, permanente et perpétuelle.

La volonté du maire cimenteur de Fontainebleau de favoriser la spéculation immobilière au détriment de la santé. Le projet de délocalisation au Bréau prévoyait un bétonnage massif du site historique de l'hôpital. Ne pouvant y parvenir, M. Valletoux obtient tout de même la constructibilité d'une large bande qui prolonge le quartier Chataux déjà destiné à la surdensité qui empiétait déjà sur le site hospitalier par une bande de 7 m
Ces manœuvres immobilières ne sont pas motivées par le service public de la santé mais par la volonté de construire à toute force, peu important l'avis des habitants ou les besoins hospitaliers.

Un membre du public confirme les informations du Collectif et ajoute qu'il a lui-même visité l'établissement. Il produit un rapport rédigé par ses soins sur la question historique et le gâchis que représente ce démantèlement.
Il considère que l'hôpital ancien sera cédé à hauteur de 100 lits à 15.000 € pièce pour un EPHAD privé, véritable privatisation d'un espace public qui aurait du resté affecté au service du public.

Un tel risque n'est cependant une fatalité. L'exemple de l'hôpital de Chalons en Champagne est là : il s'agissait de donner gratuitement des terrains militaires à la clinique privée, avec une construction par l'office local des HLM, alors que l'hôpital public végétait dans une absence de rénovation absurde. La mobilisation du public a entraîné la chute de  ce micmac.
La mobilisation paye, comme dans le cas de l'hôtel Dieu.

Un EPHAD même public est rentable : il paraîtrait raisonnable que le lieu reste affecté au service public. D'autant plus qu'un médecin PH est attaché spécialement aux lieux.

L'hôpital qui marche le mieux est un hôpital qui offre une continuité de la chaîne de soin, avec Médecine-Chirurgie-Obstétrique (MCO), Soins de Suite et Réadaptation (dit moyen et long séjour, ou SSR, menacé à Fontainebleau !) et EPHAD.

La gouvernance


La Gouvernance de l’hôpital depuis la loi HPST
(Loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital
et relative aux patients, à la santé et aux territoires) a changé la donne dans un sens antidémocratique, contre les personnels, les élus et les usagers.
Le Conseil d’administration qui comprenait des membres du personnel et avait des pouvoirs a disparu

Depuis les médecins et agents ont une part très limité de la gouvernance, les élus font de la figuration. Le Conseil de surveillance a un pouvoir très amoindri (comptes financiers et statuts). Le Directoire  est composé à 5/7 par la direction et  conseille le Directeur.
Le Directeur seul (imposé par l’Etat) dispose de très grands pouvoirs d’administration et de gestion

Fusion et  groupement hospitalier de territoire


La fusion a pour effet de détruire l’autonomie hospitalière et achever l’affaiblissement d’ensemble :
- Effet sur le service public : au lieu de renforcer les sites, on mutualise la pénurie
- Effet financier : des dettes mises ensemble plutôt que d’assurer un financement durable
- Effet sur le personnel : mutation interne entre les différents sites qui n'exige plus des formalités et donc imposée au personnel
- Effet sur la gouvernance : la direction commune en sort renforcée et les élus et personnels amoindris.

Le financement du Conglomérat résultant des la fusion pose des questions notamment sur l'étendu, les modalités et frais financiers du recours à l'emprunt.
Il convient de rejeter toute dette illégitime notamment qui repose sur des taux trop forts destinés à l'enrichissement d'opérateurs commerciaux.


Le groupement hospitalier de territoire (GHT) n'a pas la personnalité morale, mais entraîne une soumission et une réorganisation souterraine des services, avec une mise sous tutelle
Un hôpital support qui dirige l’ensemble (Melun qui plus est est en public-privé !) : cela risque de se transformer en une absorption pure et simple (c’est déjà dans le projet d’établissement pour plusieurs spécialités; déjà laboratoire et imagerie sont menacés)
Il y a l'imposition d’un Projet Médical Commun de territoire, par les services de l’État (Agence Régionale de Santé) et non pas par les médecins eux-mêmes.
Un démantèlement devient alors possible avec le transfert de services entraînant la dépossession des centres hospitaliers (labo, radio,…), la mise en place des pôles d’activité clinique ou médico-technique inter-établissements (ex : chirurgie – médecine – cancéro – spécialités médicales …etc…) à l’intérieur desquels « le fonctionnement et l’affectation des personnels médicaux et non-médicaux devra être géré en fonction des nécessités et des lieux de réalisation »

La coopération est acceptable, mais pas n'importe comment.

Plusieurs réunions avec les ARS démontrent que les GHT ne passent pas et ne correspondent pas à un territoire de santé, mais à une vue de l'esprit, un caprice administratif.


La sortie du GHT est tout à fait possible, d'autant plus que son utilité publique n'a jamais été constatée, que les territoires de santé n'ont aucun rapport avec les bassins de vie.

La dé-fusion sera plus difficile. Même si la fusion est regrettable, rien n'interdisait de lui donner un sens, non pas comme moyen de pression en vue de réduire effectifs, moyens et prestations, mais au contraire comme davier pour arracher les personnels finances qui manquent. Bref, on devrait "se battre pour le contenu plus que pour le contenant".

Quelle action pour demain ?


La coordination nationale a été représentée et présente son soutien à l'action du collectif local. Son délégué tient à rasséréner les participants en rappelant que l'Union fait la Force.

Sous couvert d’une fusion nécessaire et opportune (discours de M. Jégo dans la Republique de cette semaine) avec un discours  bienveillant (les lettres du directeur  « faisons ensemble » ), ce qu’il faut comprendre et  « mettre en lumière c’est le plan de casse  du service public des 3 hôpitaux du sud 77 ».

En terme de conclusion :
- se battre contre le GHT, en trouvant un bassin de vie comme secteur d'intervention
- exiger que la fusion ne soit pas synonyme de régression et exiger au contraire que les moyens existants avant la fusion soient conservés en totalité sinon augmentés, comme les recrutements
- surveiller l'aspect financier, tant en matière d'engagements de l'Etat qu'en privilégiant les prêts bonifiés par la puissance publique face aux intérêts générés par des emprunts privés

Les élus doivent être alertés, informés et poussés à agir dans ce sens en les responsabilisant.


Le public peut jouer un grand rôle, par voie de pétition ou autre.